Aux manettes de Top Chef, Pékin Express ou encore LOL sur Amazon Prime, Sébastien Zibi a le parcours d’un déterminé qui a toujours cru en ses rêves .
Tu as toujours voulu faire de la télé ?
Quand on me demandait ce que je voulais faire petit, je répondais : Restaurant ! C’est une véritable passion la cuisine même si je suis un piètre cuisto ! Finalement, j’ai retrouvé la cuisine dans mon quotidien avec les émissions que je réalise aujourd’hui. En fait, quand j’étais gosse, je regardais beaucoup la télé et j’ai su assez rapidement ce que je voulais faire. En classe de 5ème, le professeur de physiques de mon collège à Saint-Maur-des-Fossés avait monté un club audiovisuel, c’est là que j’ai commencé le montage.
C’est très tôt ! Tu viens d’une famille liée à l’audiovisuel ?
Pas du tout. Mon père est musicien et j’ai donc naturellement dû faire de la musique. J’étais en classe musicale et j’ai pratiqué le violoncelle pendant 7 ans. Cela m’a été utile car j’ai vraiment compris le sens de la musique et son utilité avec le montage.
Quelle école as-tu fait ?
Je me suis très vite renseigné pour les écoles et dès la seconde je savais que je voulais devenir monteur. Je passe mon Bac et je rentre à IIIS. J’ai alors 17 ans et je fais 4 heures de trajet aller / retour par jour pour me rendre dans cette école.
Quelles sont tes premières expériences professionnelles ?
En 1996, j’ai l’opportunité d’intégrer Case Productions en stage. Ils arrivaient tout juste sur TF1 et je commence aux côtés d’André Vasquez à la gestion du public. À l’époque, il s’agissait des émissions La Fureur, Les Enfants de la Télé etc…. Ce poste m’a permis de pouvoir observer de l’intérieur toute la mécanique de ce type de tournage. Certains à IIIS me regardaient avec un peu de condescendance quand je leur racontais ce que je faisais : C’était bien moins prestigieux que le Cinéma avec un grand C. Deux ans plus tard, j’ai rappelé à Case que je voulais faire du montage et Jean-Philippe Vallespir, qui montait beaucoup de leurs émissions, m’a mis le pied à l’étrier. Il m’a proposé d’être le monteur d’un numéro des Petites Canailles que Case lui avait proposé en tant que producteur. En trois jours et trois nuits, j’ai eu la formation la plus accélérée qui puisse exister. Le montage plateau a cette particularité qu’il ne faut pas qu’il se voie, c’est un montage assez différent du reste.
Quels sont les points essentiels qu’il t’apprend ?
J’apprends le sens des plans, leur valeur. L’organisation, la rigueur et la rapidité. J’ai à peine 20 ans et je deviens monteur de grands Prime pour TF1 car lui passe à autre chose. C’était une vraie opportunité. Je me retrouvais avec Arthur et Stéphane Courbit en visionnage, beaucoup de pression mais une chance incroyable de pouvoir travailler et surtout apprendre si jeune avec eux …
À quel moment passes-tu de l’autre côté de la salle de montage ?
Deux ans plus tard, à la fin d’un visionnage, Arthur me propose de faire du Switch (réalisation en régie) pour l’émission Big Brother. Nous sommes début 2001 et je deviens donc switcher sur Loft Story. Je me souviendrai toujours du moment où, à 22 ans, je suis rentré pour la première fois dans cette régie extrêmement impressionnante. Je n’en menais vraiment pas large !
C’est un tournant dans l’audiovisuel Le Loft et tu fais partie de l’aventure sans savoir l’impact qu’aurait ce programme !
Je suis aux premières loges de ce truc fou ! Je montais des sujets pour les Prime et j’assurais le Switch pour la Quotidienne. L’organisation se faisait en cours de route, nous apprenions en même temps que l’émission se déroulait. Je participe ensuite naturellement à la Star Academy 1 et ensuite, Alexia Laroche-Joubert me propose de partir comme monteur sur Opération Séduction aux Caraïbes. Elle confie la production à Thierry Guillaume que je rencontre donc en 2002. Le tournage était dans des conditions très singulières : Je commençais le montage sur place, dans la cale d’un bateau ! Encore une expérience riche avec des contraintes techniques qui semblent aujourd’hui d’un autre temps. C’est dans cette cale de bateau qu’Alexis de Gemini me repère …
C’est l’époque W9 ?
M6 monte en effet W9, sa filiale de production, qui deviendra ensuite STUDIO 89 quand la chaîne W9 sera créée. Alexis me propose de devenir réalisateur Post-Prod du programme Le Bachelor. C’est là que je rencontre Renaud Le Van Kim et Olivier Hallé qui me proposeront un plus tard Oui Chef !
Et tu rencontres Cyril Lignac ?
Je le rencontre dans son petit bureau, dans la cuisine du restaurant La Suite, et ça matche tout de suite. Je rencontre également Mathieu Jean-Toscani. C’est une aventure de dingue. On monte ensemble une équipe sur un programme qui devient très fort. On lance cet ovni sur lequel je passe ma vie entière pendant 4 mois. C’est un gros tournant Oui Chef !
Quelles sont les nouveautés avec ce programme?
C’est un docu-réalité totalement sur le vif. Il faut que l’authenticité ressorte. C’est ce que je recherche toujours aujourd’hui : le vrai. On a créé un truc magique avec Cyril, comme sur Tous en Cuisine quinze ans plus tard d’ailleurs. C’est quelques mois après Oui Chef ! que je monte ma boîte : ZEDDES PROD. Au-delà de proposer mes interventions de réalisateur, certaines sociétés comme Coyote et Fremantle me demandent de leur proposer une prestation plus globale, incluant tout le dispositif technique. Puis je retrouve Thierry Guillaume avec le programme Top Model et l’année suivante j’arrive avec lui sur la saison 4 de Pékin Express. Je n’avais pas le sceau “Réalisateur de Jeu” mais Thierry m’a fait confiance et a tenu à ce que je sois avec lui dans cette nouvelle aventure. Ces programmes marquent aussi le début d’une collaboration intense avec Florence Duhayot à Studio 89.
Tu navigues dans tous les styles de programmes !
Oui… je passe de Pékin Express au Grand Quizz de France avec Christophe Dechavanne mais aussi à Top Chef qu’on a mis en place dans des conditions d’urgence incroyables. Ensuite arrive 4 Mariages pour une Lune de Miel pour lequel ITV STUDIOS FRANCE me demande de mettre en place toute la charte de réalisation et les dispositifs de tournage avec ZEDDES. Cela devient rapidement une usine avec parfois 6 mariages simultanément le même week-end, la folie !
Qu’est ce qui te plaît le plus dans ce que tu fais ?
J’aime les nouvelles mises en place, les nouveaux challenges.
Aujourd’hui avec l’essor des plateformes quel impact cela a sur ta façon de travailler ?
Je trouve qu’il y a un challenge sur la mise en image, notamment avec Prime Video avec qui je travaille pas mal. C’est très intéressant. L’image a parfois pu être mise au second plan pour des questions de budget, car il faut toujours privilégier le fond ! Les plateformes ont une exigence artistique excitante pour un réalisateur. Les moyens sont parfois conséquents et on peut s’amuser.
Qu’est ce qui compte le plus pour toi ?
J’essaie de me mettre au service de l’histoire qu’on raconte et de toujours lier le fond et la forme. Il faut que ce soit beau mais parfois le contenu impose une mise en image qui n’est pas forcément esthétique. En fait, je crois qu’il faut surtout que cela soit cohérent, c’est comme ça. On me dit que je suis perfectionniste et un peu control freak ! C’est vrai que j’ai besoin d’organiser les choses comme je veux. J’ai mis du temps à accepter que parfois il y ait des choses qui ne se passent pas bien. Mais quand on se retrouve à être garant de grosses équipes, il faut accepter l’idée qu’on ne peut pas avoir la main sur tout !
Comment garder le soufflé monté sur des programmes qui sont présents depuis aussi longtemps que Top Chef ?
Nous sommes à 14 saisons ! Il faut se remettre en cause, être en permanente réflexion et ne pas se satisfaire de ce qu’on a déjà fait. C’est une des grandes forces des équipes de Top Chef …
Quel souvenir fou partagerais-tu avec nous ?
La création de Tous en Cuisine pendant le Covid. Je suis rapatrié d’Ethiopie avec l’équipe de Pékin Express. Je retrouve femme et enfants dans cette période folle de pandémie et le lendemain, Mathieu Jean-Toscani me propose un direct à faire deux jours plus tard : C’est le début de Tous en Cuisine. Nous sommes 10 maximum en plateau. Nous avions l’impression d’être les irréductibles Gaulois. Tout était à l’arrêt, l’ambiance était vraiment particulière.
Qui sont les gens qui composent ton équipe proche ?
La force d’un réalisateur c’est son équipe. Je ne pourrais rien faire sans celles et ceux qui m’accompagnent depuis tant d’années. Je sais que je ne leur dis pas assez, mais je me dis souvent que j’ai une chance folle de pouvoir être accompagné de tous ces talents. Et en terme de noyau dur, il y a Bérénice Vayssette, qui est ma directrice de production à ZEDDES depuis plus de 10 ans.
Quel est ton rêve ?
À bientôt 45 ans, c’est vrai que la fiction commence un peu à me titiller même si cela n’a jamais été mon objectif initial.
Quels conseils donnerais-tu à un jeune qui veut se lancer dans la télé ?
Nous sommes dans un monde en constante évolution. Je lui demanderais d’abord s’il est bien sûr de vouloir se lancer. C’est difficile parfois, la télévision est un vieux bateau qui essaie de continuer à voguer. Les budgets ont changé. Aujourd’hui nous sommes de plus en plus sur des problématiques de compromis. Mais il y a des écrans partout et il y aura toujours des histoires à raconter. Il faut juste savoir se réinventer.
Quel est ton moment préféré sur un programme ?
J’aime la genèse des projets, la réflexion et la constitution d’équipe. C’est mon côté colonie de vacances. Et puis pour être franc, j’aime bien aussi la fin. Quand on peut justement y aller, en vacances !
C’est quoi un bon réalisateur ?
Un bon réalisateur écoute. Il faut être à l’écoute en permanence.
Quel est ton lien avec Atlantis ?
Je sais comment se passe la post-production pour avoir été monteur. J’essaie d’avoir toujours un oeil sur la post-production, même de loin. Quand je vais chez Atlantis je suis plus souvent au département tournage évidemment. Atlantis a su créer un lieu de vie. En montage on peut se sentir seul parfois et ce n’est pas le cas ici. Atlantis est un lieu de partage et c’est sa force.
Crédit Photos : Patrick Robert, Pierre-Olivier, Vincent Faure-Chappat, Charlotte Vignon